Grandes baleines et CO2

Que les fans de gros 4×4 ou d’énormes yachts me pardonnent, cet article n’est pas destiné à encenser les gros jouets. Il cherche plutôt à mettre en avant une piste à considérer très sérieusement sur le fait de pouvoir stocker naturellement une grosse partie du CO2 qui nous pose problème à moyen et long terme.

Vous connaissiez peut être déjà la notion de captage de CO2 par les végétaux en phase de croissance justifiant ainsi l’intérêt de drastiquement limiter la déforestation. Mais saviez-vous qu’un corps de baleine agit de manière tout à fait comparable à un grand arbre et qu’il conviendrait de préserver ces grands cétacés au même titre que la forêt amazonienne ?

En effet, en complet rapport avec leur taille imposante, l’un comme l’autre peut stocker du CO2 pendant plusieurs dizaines d’années. Il y a toutefois une différence. Contrairement au CO2 stocké dans un arbre (et qui y restera sauf si le bois est détruit), celui stocké dans le corps d’un animal n’est maintenu qu’en se nourrissant. L’avocat du diable dirait que la nature ayant horreur du vide, une espèce serait forcément remplacée par une autre. Vrai ! Mais pour les écosystèmes durement touchés par la chasse à la baleine, les gros cétacés sont remplacés par des espèces beaucoup plus petites. Or il est prouvé que plus un animal est gros, plus son rendement pour stocker et assimiler le CO2 est bon (par rapport à la quantité de nourriture à assimiler).

A titre d’exemple, reconstituer le stock de baleines permettrait ainsi de stocker autant de CO2 que la pousse de 110000 hectares de forêt. Et, contrairement à la théorie sur la fertilisation des océans (qui est une piste très controversée dans le monde de l’océanographie), cette façon de faire serait tout aussi rentable mais avec beaucoup moins de risques que peut en connaître un apprenti sorcier !

L’avocat du diable (encore lui !) nous dira alors « Oui, mais quand la baleine meurt, qu’advient-il du CO2 qu’elle a stocké ? ». La réponse est simple : Hormis pour les cas d’échouages, une baleine mourante va couler par le fond, à plusieurs centaines voire quelques milliers de mètres, entraînant avec elle son stock de CO². Ce dernier sera ensuite assimilé par l’océan lors de la décomposition de l’organisme plutôt que de finir dans l’atmosphère.

Bp92sm04-siteLa chasse industrielle à la baleine a largement participé à décimer les populations de cétacés sur les deux derniers siècles faisant déjà d’énormes dégâts (à titre d’exemple 99% des rorquals vivant en antarctique a été décimé) et aujourd’hui, certains pays, sous couvert « d’étude scientifiques » ou de traditions reviennent en force pour mettre à mal le moratoire sur la chasse à la baleine…

Ainsi, il est aujourd’hui non seulement nécessaire d’empêcher cela mais également d’inverser la tendance en reconstituant le stock de grands cétacés. Si nous ne le faisons pas pour eux, faisons-le au moins pour nous et nos descendants.

Référence : « The impact of Whaling on the Ocean Carbon Cycle : Why Bigger Was Better » – Andrew J. Pershing, Line B. Christensen, Nicholas R. Record, Graham D. Sherwood, Peter B. Stetson. (Pershing10_whales carbon)

Copyright: Didier Fusaro et cetaces.org.