Evidence d’une population côtière de dauphins océaniques
Le Dauphin bleu et blanc Stenella coeruleoalba est historiquement présent dans les eaux proches du littoral azuréen depuis au moins un siècle, et sans doute beaucoup plus. Opportuniste au niveau de son régime alimentaire, il s’accommode de toutes sortes de proies pélagiques, ce qui explique qu’il soit présent dans les eaux profondes même quand elles sont à 2 kilomètres du rivage.
Les observations scientifiques de cette espèce dans la région remontent aux années 70 (travaux de Denise Viale et de son équipe) même si des confusions possibles avec le Dauphin commun obscurcissent parfois l’image de la présence passée du dauphin Stenella dans les eaux côtières.
Le Groupe de Recherche sur les Cétacés a pour sa part commencé à étudier les dauphins bleus et blancs de la région d’Antibes à la fin des années 80, parvenant à une description scientifique de son utilisation de l’habitat local : les Stenella se rapprochent de la côte en début de soirée, pour se nourrir durant la nuit, et rejoindre une zone un peu plus au large en fin de matinée. Ces déplacements sont liés à leur cycle d’activité avec un nourrissage à prédominance nocturne (lien pdf)
En peu de temps, nous avons également confirmé que les Stenella habitaient la région en permanence, contrairement à une majorité de la population du large qui quittait le nord en hiver (lien pdf). Cette résidence fut également mise en évidence par des travaux de photo-identification menés au début des années 2000.
A cette même époque, l’état de la population azuréenne de dauphins bleus et blancs semblait stable, ou même en amélioration en raison de l’arrêt de la pêche au filet dérivant. Mais on pouvait déjà observer une croissance du trafic de moto-plaisance et un allongement de la saison touristique, en même temps qu’une augmentation de la taille des bateaux.
La décennie 2005-2015 vit s’emballer le trafic de plaisance, tandis qu’une exploitation touristique des dauphins incluant le nage-avec, d’abord embryonnaire, se développa rapidement jusqu’à devenir un facteur de pression important pour les cétacés.
Face à cette fréquentation de leur habitat, on pouvait anticiper une dégradation de la situation de ces dauphins côtiers: de nombreux exemples similaires à l’étranger illustrent un lien de cause à effet. Cette dégradation ne tarda pas à prendre forme, avec en premier lieu un affaiblissement de la présence des dauphins près des côtes au profit de la zone plus au large.
En France, c’était la première fois que des données nombreuses permettaient d’étudier un phénomène de dégradation d’un tel habitat de dauphins : une étude dédiée du cas des ‘Stenella azuréens’ fut lancée grâce à l’appui du Sanctuaire Pelagos.
Elle allait permettre de mieux caractériser le phénomène de mise en danger de la population de dauphins de la région d’Antibes.