Rencontre avec un cétacé sauvage, en forme ou en détresse : les bons réflexes à adopter

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Comme chaque année, si le mois d’août est synonyme de vacances ou de balade en mer pour de nombreux plaisanciers, il est aussi synonyme de période particulièrement sensible pour les cétacés près de nos côtes !

Quels comportements adopter en cas de rencontre, pour leur sécurité et pour la vôtre ? Petit tour d’horizon :

Une règle d’or, ne pas perturber

Les cétacés utilisent leur milieu pour subvenir à leurs besoins vitaux : alimentation, repos, reproduction… L’observateur humain doit donc prendre garde, en cas de rencontre, à ne pas perturber l’activité des animaux, afin de ne pas diminuer l’attractivité de l’habitat pour les cétacés.
Cela parait évidemment relever du bon sens, mais ce principe a tout de même été inscrit explicitement dans la loi française :

L’arrêté du 1er juillet 2011 interdit notamment « la poursuite ou le harcèlement des animaux dans le milieu naturel » ainsi que « la perturbation intentionnelle incluant l’approche des animaux à une distance de moins de 100 mètres dans les aires marines protégées ». Depuis l’an dernier, cette interdiction d’approche à moins de 100 mètres a en plus été étendue à l’ensemble des eaux méditerranéennes françaises par l’arrêté préfectoral du 6 juillet 2021.

Ce plaisancier azuréen pense-t-il que le but du jeu est de grimper sur le cachalot ?

L’impact concret des perturbations est parfois mal cerné par les plaisanciers ; il est pourtant particulièrement important en cette fin d’été, puisque nous sommes en plein dans la période de mise bas et d’allaitement des petits delphinidés. Un nourrisson de Stenella ou de Delphinus qui se trouverait séparé de sa mère, par exemple suite à l’approche indélicate d’un observateur, serait pratiquement condamné à mort s’il n’arrivait pas à la retrouver très rapidement (ce qui peut en plus être rendu encore plus difficile lorsque la pollution sonore d’un nombre important de navires à moteur compromet la communication entre individus à longue distance, comme c’est le cas en été à proximité des côtes touristiques)… ce type de drame arrive malheureusement tous les étés.

Pas d’approche d’un groupe de dauphins avec nourrissons… danger de mort… littéralement..!

Plus généralement, rappelons-nous que pour un groupe de cétacé, chaque minute « dépensée » à éviter une nuisance d’origine anthropique est une minute qui ne pourra pas être utilisée pour subvenir à ses besoins biologiques… alors à nous d’être précautionneux !

Une sortie matinale en famille… ces plaisanciers ont forcé le contact pendant de longues minutes, sûrement sans penser à mal… mais ils ont poussé le groupe de Stenella vers la sortie de la baie où ils étaient en train de se nourrir !


Pour une observation respectueuse d’un groupe de cétacés, ces points du Code de Bonne Conduite sont donc à garder en tête :

  • Lorsque vous êtes à 300 mètres environ des cétacés, adoptez une route en rapprochement lent et constant (1 à 2 nœuds seulement de vitesse relative par rapport au mouvement propre des animaux), en vous dirigeant plutôt vers un point à côté du groupe que directement vers les cétacés
  • Profitez de cette approche lente pour identifier l’espèce, le nombre, le comportement des animaux (une paire de jumelles est toujours utile à bord !)
  • L’approche doit être interrompue si vous constatez la présence d’animaux en bas-âge (individu nageant en paire serrée avec un autre animal, ou faisant moins de deux tiers de la longueur d’un adulte)
  • Il faut également cesser l’observation en cas de changement brusque du comportement des animaux (évitement, regroupement, changement de direction, plongée, sauts fuyants, etc…) ; certaines postures (animal tapant sa nageoire caudale à la surface de l’eau, ou sortant les yeux à l’air libre pour vous observer) sont souvent marqueuses de nervosité, et doivent vous inciter à vous éloigner des animaux
Sauts soudains, groupés, avec nage rapide :
ces animaux semblent avoir envie de s’esquiver, et ce n’est évidemment pas le moment d’essayer de les approcher
  • Ne vous approchez pas à moins de 100 mètres des cétacés (vous pouvez à peu près faire le calcul en connaissant la longueur de votre bateau), et ne les poursuivez pas
  • Ne barrez pas la route des animaux et, si plusieurs bateaux sont présents, veillez à ne pas encercler les cétacés
  • Ne tentez pas de les nourrir, de les toucher ou de nager avec eux.

Est-ce que le code de bonne conduite s’applique toujours si ce sont les animaux qui s’approchent ?
Oui ! Il n’est en effet pas rare que des animaux soient curieux ou joueurs, et s’approchent de vous ou viennent surfer à l’étrave. Dans ce cas-là, il faut toujours avoir le code de bonne conduite en tête, et se rappeler que la règle des 100 mètres reste valide : si des animaux ont franchi eux-mêmes cette limite de distance en s’approchant vers vous, alors vous pouvez les laisser faire mais vous ne devez plus faire de mouvement vers eux tant qu’ils sont sous cette distance limite. Ainsi ce sont toujours les animaux qui décident de jusqu’à quel point ils voudront vous approcher, et ils pourront facilement se retirer quand ils le jugeront bon.

Ces deux Dauphins bleus et blancs nous ont rattrapés, et semblaient avoir très envie de nous observer. Tant mieux pour tout le monde, tant qu’ils restent maîtres de la distance et de l’interaction.


Notons que ces principes restent également applicables dans le cas, assez fréquent ces derniers temps, de dauphins isolés approchant des nageurs : il faut profiter du moment privilégié offert par l’animal… mais ne pas essayer de le toucher ou de le poursuivre.


Le cas particulier des cétacés en détresse ou échoués :

Certains animaux peuvent parfois être en difficulté, malades ou blessés, comme nous l’a montré plusieurs fois l’actualité de ces derniers mois. Le comportement à tenir en cas de rencontre avec un tel animal est différent.

Comment les reconnaître ?
La présence d’un ou plusieurs de ces signes sera marqueur d’une détresse :

  • Animal en train de s’échouer sur le rivage, nageant dans une eau de moins d’un mètre de profondeur ou nageant dans un endroit anormal (marais, fleuve, port, …)
  • Animal plongeant peu, passant plus des deux tiers de son temps avec le dos émergé en surface pendant une période de plus de 15 minutes
  • Animal tournant en rond sur place, ou nageant très lentement (moins d’un mètre par seconde)
  • Animal présentant une blessure visible, ou étant empêtré dans un filet ou un déchet.

Si vous vous trouvez en présence d’un cétacé vous paraissant en difficulté selon ces critères, votre rapidité d’action pourra peut-être contribuer à aider l’animal !

Les bonnes idées à avoir :

  • Contacter au plus vite une entité compétente et habilitée à gérer ces animaux. En France métropolitaine, il n’y en a que deux : le Réseau National Échouages (tél 05.46.44.99.10, 7j/7) et les pompiers (18). Il est bon de garder ces deux numéros en tête, car tout appel dirigé vers un autre destinataire provoque une perte d’informations et un retard dans la prise en charge… qui pourraient avoir des conséquences funestes. Il en est de même des signalements sur les réseaux sociaux, qui n’arrivent souvent aux oreilles compétentes que plusieurs jours après l’observation…
  • Prendre un point GPS de votre position au moment de l’observation (sur votre téléphone ou votre GPS de bord) ; noter également l’heure
  • Ne pas s’approcher de l’animal ni le poursuivre… cela pourrait malheureusement augmenter son stress et provoquer sa mort
  • Ne pas tenter de toucher l’animal, même s’il vient vers vous : cette règle, déjà valable pour les animaux sains, est encore plus importante pour un animal en détresse, qui a de bonnes chances d’être porteur de pathogènes dangereux, potentiellement transmissibles aux humains. De plus, dans son état stressé, il pourrait éventuellement vous mordre ou vous blesser
  • Si possible, prendre une photo ou une vidéo de l’animal, sans que cela ne vous conduise à trop l’approcher ; noter si d’autres cétacés sont présents dans la zone, ou pas (un animal en détresse pourra parfois être isolé… mais l’inverse n’est pas vrai !).
Dauphin commun en grande difficulté :
S’approche de nous en se déplaçant très lentement, ne s’immerge plus, respire difficilement, a de nombreuses plaies purulentes sur le corps… qu’il ne faut évidemment pas toucher. L’animal sera évalué par des personnes compétentes, et pris en charge au maximum des possibilités


Que faire si je trouve un cétacé mort ?

Sa prise en charge sera importante pour des raisons de connaissance scientifique et de santé publique. Ce que vous pouvez faire :

  • Contacter le RNE ou les pompiers
  • Noter la position de l’animal (position GPS particulièrement intéressante si c’est un cadavre qui dérive au large)
  • Ne pas toucher le cadavre (ni se baigner à proximité) ; si des animaux domestiques sont à vos côtés (chiens notamment), les garder à l’écart de la dépouille pour ne pas risquer la transmission de maladies.


Nous espérons tout de même que vous vous trouverez plus souvent en face de cétacés vivants et en pleine forme qu’en face d’animaux dans les deux dernières situations ! Tous ces conseils sont assez simples et relèvent souvent du bon sens, ils n’ont pas pour but de vous entraver mais ont comme priorités la tranquillité des animaux et votre santé.

Et comme les choses sont bien faites, le respect des cétacés en forme, surtout dans le cas actuel des paires mère-nourrisson, fera diminuer le nombre de fois où les animaux se retrouvent en détresse ou échoués. Bonne idée, non ?

Adrien et cetaces.org