Dauphins de Gascogne : l’Etat recadre sévèrement le gouvernement

L’ordonnance du Conseil d’Etat peut sauver la vie à un millier de dauphins

Par son ordonnance du 22 décembre, le juge des référés suspend la plupart des dérogations qui dévoyaient l’arrêté de fermeture des pêcheries responsables des captures de cétacés. Saisi en urgence par plusieurs associations dont France Nature Environnement, le Conseil d’Etat a jugé qu’au regard de la législation française et européenne le projet d’arrêté n’était pas de nature à protéger efficacement la population de dauphins communs. Et c’est un véritable feu d’artifices de points de droit qui étayent cette ordonnance du juge des référés.

Pour rappel, si l’arrêté prévoyait bien une fermeture d’un mois (du 22 janvier au 20 février) pour la plupart des pêcheries responsables de la mortalité massive de dauphins, il était assorti de multiples dérogations qui en annulaient l’efficacité. Un arrêté en trompe-l’oeil comme l’avait souligné notre commentaire lors de l’enquête publique. Pour étayer son ordonnance, le juge se livre à un réquisitoire fouillé, un travail d’anthologie portant aussi bien sur les éléments scientifiques, complexes, du dossier que sur les points juridiques, ou sur la réglementation des pêches.

L’ordonnance suspend la plupart des dérogations octroyées aux pêcheurs déclarant se livrer à des expérimentations, embarquant des caméras (!), etc., et étend même la fermeture temporaire à une nouvelle pêcherie : la senne pélagique. Mais le juge maintient l’exemption de fermeture pour les bateaux de moins de 8 mètres, arguant que l’ampleur des captures de cétacés n’est pas assez documentée dans ce cas précis.

Si le gouvernement ne contourne pas le jugement du Conseil d’Etat et si les pêcheries responsables cessent effectivement leur activité durant un mois d’hiver, on peut estimer que le juge des référés vient de sauver la vie à un millier de dauphins au moins. En revanche deux points suscitent notre inquiétude : d’une part, on sait que les contrôles en mer par les autorités sont extrêmement peu nombreux – l’administration va-t-elle se montrer attentive au respect de la loi ? -, d’autre part l’ordonnance ne s’applique qu’aux pêcheurs sous pavillon français.

Les pêcheries espagnoles, peut-être majoritaires dans le golfe de Gascogne à cette période, vont-elles continuer leur activité non contrôlée, et donc annihiler en partie l’effet de la fermeture temporaire que les pêcheurs français seront obligés de respecter ?

Alexandre et cetaces.org