Cinquième vague … pour l’éolien offshore français

Y aura-t-il un effet ‘Saint-Brieuc’ pour l’industrie électrique offshore ?

Le gouvernement marcherait-il sur des oeufs à la suite des diverses mésaventures subies par le projet d’usine électrique offshore de Saint-Brieuc, ou de débats houleux dans la région d’Oléron ? En tout cas cela ne transparait pas dans les annonces pour le prochain appel d’offres de l’éolien offshore français : les prochains sites concernés par le développement de l’énergie électrique marine sont (1) le large de la Normandie entre Etretat et Barfleur, (2) le sud Bretagne, avec la région de Belle-Ile, le centre Gascogne avec le parc d’Oléron, et deux sites du golfe du Lion, officiellement pas encore définis. Pour l’implantation proche de Belle-Ile, et celles de Méditerranée, il s’agirait de la modalité ‘éolien flottant’, adaptée à des eaux plus profondes que le ‘posé’.

Demandez le programme ! La prévision actuelle gouvernementale pour de l’électricité avant 2030. Attention toutes les installations ne sont pas à leur place exacte (source : ministère de la transition …)

Quels sont les éléments intervenus depuis notre dernier article sur le sujet, au printemps dernier ? Tout d’abord, nous sommes entrés dans une période pré-électorale, celle où les candidats tentent d’être consensuels … quoi de plus consensuel que le BIEN de la planète, avec une énergie ‘propre’, ‘illimitée’, et bien sûr ‘pas chère’ ? Et patatras, voilà qu’un, deux, … , candidats affichent une position non anti-nucléaire, et même parfois, anti-éolien ! Le nucléaire, de vilain canard boiteux et honteux, redevient un candidat plausible de l’avenir énergétique du pays. Un rapport officiel établit même que son coût reste compétitif, malgré la gabegie de l’EPR de Flamanville.

Entre Barfleur et Etretat, le paysage marin sera dominé par des pylônes bien plus hauts que les falaises réputées (source : www.eoliennesenmer.fr)

Ensuite, un avis du Conseil National de Protection de la Nature, une assemblée âgée de 75 ans et peu susceptible de s’agiter aux quatre vents, vient éclairer le débat par des considérations de préservation de la diversité biologique, de précaution par rapport aux risques sur l’habitat, de protection de faune marine, et même de préoccupation vis-à-vis des atteintes au paysage. Au grand dam des pro-éoliens offshore, l’avis du CNPN est plutôt critique sur l’essor trop rapide et sans connaissances suffisantes de l’électricité offshore, voulu par le gouvernement, les industriels de la filière, et plusieurs grandes ONG environnementalistes.

Officiellement dénommé ‘Sud de Bretagne’, ce projet d’éolien flottant aurait aussi pu s’appeler Belle-Ile ! (source : www.eoliennesenmer.fr)

Par ailleurs, le revers de la médaille éolienne offshore se dévoile rapidement : l’intermittence de cette énergie obligera à doubler l’effort industriel par la fabrication en masse d’un hydrogène qualifié de ‘vert’ ou ‘bleu’ selon les communiqués de presse des lobbies relayés par la presse économique. Hydrogène qu’il faudra fabriquer dans des usines avec de l’eau et de l’électricité, puis transporter par millions de tonnes (comment) avant de le consommer dans des filières où tout est à inventer. Question : où seront les usines … Bretagne, Provence, Normandie, le Grand-Paris, Savoie, … ? Sans parler des centrales à gaz indispensables pour lisser les à-coups de consommation.

Les habitants d’Oléron et de la région ont appris le sens du mot ‘repowering’ : cela veut dire que l’on augmente la puissance qui était initialement prévue dans les plans soumis au public … donc, soit la hauteur, soit le nombre des éoliennes (source : www.eoliennesenmer.fr)

Enfin, le cas Saint-Brieuc interpelle forcément : alors que l’on était à peine entré dans le vif de sujet, quelques problèmes techniques et une levée de boucliers des pêcheurs mettent en lumière une préparation et une exécution du dossier pas si exemplaires que cela. Tiens donc, la profession de pêcheur n’est pas si encline à gober le produit d’une concertation si globale et si inclusive vantée par la technocratie, des associations, et les industriels, et acceptée par les représentants élus de ladite profession, à coup de millions de promesses de subvention. Grande découverte pour les ‘élites’ : les pêcheurs aiment pêcher en mer là où la ressource est bonne.

Pour le moment, seuls deux usines électriques ‘flottantes’ de 250 MW sont prévues, mais les périmètres délimités permettraient 10 fois plus … (source : www.eoliennesenmer.fr)

Les pêcheurs ‘premiers écolos marins de France’ ? Ce n’est pas le moindre des avatars de l’aventure française de l’énergie offshore. Simple péripétie de la part ‘d’une poignée de professionnels grognons’ à Saint-Brieuc, illustration d’un cas de NIMBY si coutumier dans tous les dossiers occupant de l’espace commun, ou véritable entrée en matière pour l’électricité offshore française qui va préempter des dizaines de milliers de kilomètres carrés d’un espace marin convoité par tous … et occupé par la faune marine protégée, la grande oubliée du dossier ? Nous verrons bien.

Touche pas à mon pote et à son habitat : il n’a pas besoin de l’électricité ! C’est la position du Groupe de Recherche sur les Cétacés

En matière de conclusion, la véritable énergie électrique verte-et-bleue, c’est la diminution de consommation … un précepte élémentaire oublié de nos décideurs, élus ou non, qui ne cherchent pas à changer de mantra, restant esclaves de l’hyper-consumérisme né au XXe siècle, qui conduit la planète à la catastrophe écologique. Cependant, il demeure une CERTITUDE : l’électricité de demain sera très chère. Le conseil du rédacteur de ces lignes : regardez votre consommation électrique de l’hiver dernier (les ‘kWh’) et faites le pari de diminuer ce montant de 10% durant la prochaine période hivernale … vous ‘produirez’ de l’énergie verte-et-bleue sans impacter la Nature !

Alexandre et cetaces.org