Captures dans le golfe de Gascogne : aucune avancée

Combien de kg de dauphin pour une tonne de poisson ?

Comme en chaque début d’hiver, la question se pose pour les protecteurs des dauphins comme pour les consommateurs de poisson du golfe de Gascogne : combien de milliers de dauphins vont mourir dans les engins de pêche cet hiver ? A très peu de choses près, il ne faut pas attendre quoi que ce soit des mesures gouvernementales sur le plan des captures accidentelles.

Le ‘High Level Group’ avance que l’abondance des dauphins serait stable, pour écarter l’option d’une fermeture temporaire … mais la précision des estimations est de +/- 30 % !

Pour avoir suivi les travaux du Groupe de Travail ad hoc consacré au sujet, le Groupe de Recherche sur les Cétacés a pu observer les positions des uns et des autres, connait les décisions prises par le gouvernement et les actions mises en oeuvre par la filière ‘pêche’. Pour avoir prospecté dans le golfe de Gascogne depuis l’été 2020, le GREC développe sa propre vision scientifique du problème, celle de naturalistes exigeants en matière de protection des cétacés.

Petit groupe de dauphins communs en hiver : ils cherchent de la nourriture …

Du côté officiel, les derniers échanges entre la commission européenne (CE) et le ministère (plus exactement le South Western High Level Group (SWHLG), un comité qui sert de point focal pour les gouvernements de la région) ont abouti à figer la situation pour la saison 2021-22. Ces échanges entre l’Europe et les gouvernements (France et Espagne principalement) prennent du temps, temps pendant lequel aucune décision concrète n’est prise permettant une diminution immédiate des captures.

Plus de 3 ans après la création du Groupe de Travail, on n’a pas encore une image approximative des pêcheries responsables de la mortalité !

La DG ‘Pêche’ de la CE, s’appuyant sur les conclusions d’un comité d’experts indépendants a indiqué qu’elle ne soutenait pas le plan d’actions proposé par le gouvernement français (pour faire simple), pour la raison qu’il ne conduisait pas à une diminution des captures à court terme.

Une triste nécessité : examiner des centaines de dauphins morts pour estimer l’importance des captures

Les experts scientifiques indépendants ont alerté la CE sur les hauts niveaux d’incertitude affectant l’évaluation des impacts : les chiffres avancés sont une limite de mortalité accidentelle « tolérable » de 4927 dauphins pour une population estimée à 634 286 dauphins communs pour tout le nord-est atlantique. MAIS CETTE LIMITE DOIT INCLURE TOUS LES FACTEURS DE MORTALITE CAUSEE PAR L’HUMAIN et pas seulement la mortalité induite par la pêche dans le golfe de Gascogne.

La DG ‘Pêche’ de la CE a donc recommandé aux gouvernements régionaux (1) de mettre en place des périodes de fermeture temporaire des pêches dès cet hiver, (2) de mettre en place des expériences à grande échelle pour évaluer l’effet de différents types de pinger sur les captures dans les filets, mesures qui ont produit des effets bénéfiques ailleurs en Europe (et aux USA).

La saisie journalière des données météo permet une bonne interprétation des séries d’échouages

En réponse à ces recommandations de la CE, le SWHLG (en clair les gouvernements) réitère que sa politique est axée sur l’augmentation des connaissances sur le sujet, que les résultats des campagnes aériennes SAMM ‘montrent que l’abondance estimée est stable depuis 10 ans’, que les balises acoustiques de dissuasion sont en cours d’évaluation dans la région et qu’on attend de connaître si leur efficacité est concluante.

La saisie quotidienne des données AIS permet d’identifier et de compter les bateaux de pêche

Le groupe gouvernemental affirme que la fermeture temporaire de pêcherie n’est pas d’actualité et aurait des conséquences socio-économiques disproportionnées, et que cette option serait réexaminée ultérieurement. Il indique aussi vouloir intensifier ses tests de pingers sur les filets statiques, puis évaluer les résultats pour proposer des mesures communes aux pays impliqués.

Les fileyeurs, qu’ils soient français ou espagnols, constituent une partie toujours inconnue du problème

Le point d’opposition entre les propositions gouvernementales et les recommandations de la commission européenne est donc clairement, en cette période pré-électorale, le refus de mettre en place des mesures de fermetures temporaires de pêcheries pour faire baisser les captures dès cet hiver. Face à ce refus, qui satisfait la filière pêche mais qui contraste avec la posture de la France à l’international (Congrès de l’UICN), il est impossible de conclure que le Groupe de Travail qui se réunit depuis plus de trois ans a permis des avancées concrètes pour la protection des dauphins.

Les prospections à petite échelle en hiver contribuent à augmenter l’expertise du GREC, une contribution ‘Low Level’ en quelque sorte 😉

Le Groupe de Recherche sur les Cétacés examine en ce moment l’opportunité de continuer à participer (sous couvert de France-Nature-Environnement) aux réunions de ce comité. Le GREC continue à être actif sur la problématique, mettant à profit la présence hivernale de son bateau sur la façade atlantique.

Alexandre et cetaces.org