Autopsies de dauphins…

Le Groupe de Recherche sur les Cétacés dans ses œuvres

Le Groupe de Recherche sur les Cétacés, connu pour ses 35 années d’observations en mer, comprend parmi ses membres deux vétérinaires titulaires de la ‘carte verte’, l’autorisation délivrée par le Réseau National Echouages pour intervenir sur les mammifères marins échoués. Parmi les correspondants RNE, des vétérinaires sont formés spécifiquement pour effectuer des nécropsies de qualité professionnelle sur les cétacés.

Intervention urgente de nuit sur un jeune dauphin (mort) arrivé au rivage et… risquant de repartir avec le ressac

Qu’aucun mammifère marin arrivé sur les rivages de France ne manque d’être identifié, mesuré, ‘sexé’, cela constitue en soi un défi : c’est la mission officielle du RNE. Adrien, du GREC, fait en sorte pour sa part que ce défi soit relevé en zone azuréenne ; il a notamment noué pour ce faire des relations constructives de partenariat avec le ‘GSA 06’ (Groupe de sauvetage animalier des Alpes-Maritimes), des sapeurs-pompiers spécialisés.

Les sapeurs-pompiers du GSA conditionnent un petit dauphin mort, pour examen ultérieur

La plupart du temps, c’est le GSA qui ‘gère’ les cétacés arrivés au rivage, assisté parfois par Adrien, par exemple quand l’animal est encore vivant… ou qu’il s’agit d’un ‘presqu’échouage’. Cette première phase de la prise en charge est parfois délicate, par exemple en saison estivale lorsque les services d’une commune balnéaire souhaitent voir ‘disparaître’ rapidement un cétacé malodorant. Dans le département du Var, les agents d’intercommunalité sont également souvent mobilisés.

En salle d’autopsie au Laboratoire Vétérinaire Départemental, on commence par un examen externe minutieux

Le Laboratoire Vétérinaire Départemental est un précieux maillon logistique et scientifique de la chaîne ‘d’exploitation’ d’un spécimen mort : grâce à la collaboration développée au fil des années, les échouages peuvent y être traités de manière professionnelle, les données scientifiques sont réunies et les précautions d’hygiène ou de santé publique y sont facilement appliquées.

L’exploitation du spécimen dépend de son état : DCC 1 (très frais) ou DCC 4 (très putréfié) voire 5 (à l’état de restes)

Lorsque les conditions logistiques sont plus délicates, ou qu’éventuellement salle d’autopsie du LVD n’est pas disponible (le laboratoire ne peut pas accueillir tous les cétacés de la région azuréenne, et traite par ailleurs de nombreux autres spécimens d’animaux morts), il faut que le dauphin soit quand même exploité au mieux : l’autopsie a alors lieu dans un local technique municipal ou privé, ou même au domicile du correspondant RNE. Pas de compromis sur la qualité du travail, néanmoins.

C’est l’été, une curieuse partie de ping-pong se joue dans le jardin d’une maison d’Antibes : on collecte les échantillons scientifiques

La phase principale du traitement d’un spécimen consiste à collecter une série très précise d’échantillons sur l’animal : dents, lard, morceaux de muscle, de foie, de poumon… Tout cela sera centralisé au centre RNE de La Rochelle (PELAGIS) pour une exploitation scientifique ultérieure. Cette opération dure plus d’une heure… à condition de bénéficier d’un assistant ; 2 à 3 heures si le vétérinaire opère seul. L’état de maturité sexuelle et le stade reproductif sont également ciblés lors de l’examen.

Infestation parasitaire (nématodes) dans un poumon : les cétacés sont de véritables réservoirs à parasites de toutes sortes

La phase de nécropsie proprement dite intervient juste après : le cétacé mort est ‘démonté’ pièce par pièce, et chaque organe est examiné pour y découvrir les signes d’une maladie, identifier les parasites, le mesurer, le photographier, éventuellement le prélever… Il s’agit ici de déterminer l’état général du spécimen juste avant sa mort, et si possible d’en découvrir les causes. Par exemple, si un dauphin avec l’estomac plein était en mesure de s’alimenter correctement (nager, plonger, poursuivre) avant de mourir, sa mort est due à une autre cause que la malnutrition.

Le contenu d’un estomac constitue une donnée primordiale pour déterminer la santé d’un animal mais aussi l’écologie d’une population. Attention à ne rien perdre !

Les données d’une autopsie complète constituent donc un gisement considérable d’informations utiles à la compréhension de l’état d’une population. Après des années d’effort et de concertation, le réseau échouages fonctionne correctement en zone azuréenne… une performance saluée par les ‘politiques’ quand ils apprennent que tout ce travail est effectué bénévolement, pour la science. L’étape suivante pourrait d’ailleurs être de les inciter à en financer certaines dépenses, qui restent pour l’instant… à la charge des intervenants.

Alexandre et cetaces.org