Whale-jumping : une pratique à proscrire

Whale-watching ou whale-jumping ?

Le whale-watching est une activité très répandue dans le sanctuaire Pelagos, grâce à laquelle chaque année plus de 100 000 touristes peuvent voir et photographier les cétacés, mammifères marins protégés par la loi. Mais pratiquée n’importe comment, cette activité commerciale est nuisible aux cétacés : elle les empêche de mener à bien leur activités vitales, et risque de les blesser. Il existe de nombreuses « règles de bonne conduite » de par le monde pour encadrer le whale-watching, dont une version a été adoptée par le sanctuaire Pelagos. Mais dans le sanctuaire, certains opérateurs pratiquent le whale-jumping, qui consiste à larguer des clients à proximité de cétacés.

Approche à quelques mètres par les whale-jumpers
Approche d’un cachalot à quelques mètres par les whale-jumpers

Nous avons été témoins de cette activité le mercredi 17 août, lors d’une sortie de recherche pour une étude dans le cadre du programme scientifique du sanctuaire Pelagos. Guidés par notre hydrophone, nous nous somme retrouvés à proximité de quatre bateaux attendant visiblement  un cachalot qui effectuait une sonde de chasse. Lorsque le cachalot a émergé, à 13h28, une vedette type « pêche au gros » s’est précipitée vers lui à une vitesse de 10 à 15 nœuds.

On saute à côté du cachalot
Moment tant attendu : on saute à côté du cachalot

Par la suite, nous avons compté quatre séances de jumping, au cours de laquelle nous avons observé que la technique du prestataire semblait au point de longue date, un mouvement du bateau tendant à entraver la fuite du cétacé après le saut des clients. Cette technique entraîne un stress important pour l’animal, et peut avoir pour but de prolonger le contact des clients avec le cachalot.

Le cachalot se retourne sur le côté
Le cachalot se retourne sur le côté, ne pouvant fuir

Le cachalot a donc été empêché de poursuivre ses sondes de chasse, puisqu’il n’a pu sonder qu’au bout de 22 minutes, alors que d’habitude sa séance de respirations ne dure qu’une dizaine de minutes. Encore a-t-il fallu que par un échange de propos assez vifs, nous dissuadions l’opérateur, un « professionnel », de poursuivre son oeuvre. Un autre bateau témoin de la scène se tenait à une distance respectable de ces événements.

L'opérateur s'éloigne: mission accomplie
L’opérateur s’éloigne : mission accomplie

A bord, tout le monde ou presque semblait satisfait: vous pensez, pour 300 euros, être à 1 ou 2 mètres d’un cachalot, ce n’est pas le voisin de palier ou de bureau qui aura vécu une pareille « aventure » ! Le cachalot, lui, va enfin pouvoir sonder après avoir réalisé son indispensable série de respirations. Il aura juste perdu l’équivalent d’une demi-sonde de chasse, ou encore environ 5% de sa ration journalière.

Caudale de cachalot
13h50 : enfin, le calme des profondeurs !

Malheureusement, comme les opérateurs communiquent par téléphone, qu’il y a au moins un avion de repérage, et que par temps calme il est très facile de repérer une baleine en train de souffler, cette séance de whale-jumping peut se répéter plusieurs fois par jour, interrompue par du whale-watching classique. De quoi dissuader un cachalot de venir se nourrir dans le nord du sanctuaire.

Whale-watching
15h35 : c’est l’heure du bus de San Remo

Est-ce que ce cirque cessera un jour ? Oui, si les autorités décident de se préoccuper (à leur rythme) du phénomène : puisqu’il existe des lois de protection, où sont les agents chargés de les faire appliquer ?

A moins qu’un certain jour, un cachalot de caractère irascible ne balance un coup de queue au milieu de ce petit monde: certains whale-jumpers ne remonteront pas vivants à bord, l’opérateur connaîtra la gloire éphémère des premières pages des gazettes… et les autorités « consternées » se préoccuperont alors de ces exactions qui font du tort aux cétacés protégés !