Étudier le comportement des cétacés…

Un art très difficile à maîtriser, même pour des cétologues avertis

L’étude des cétacés en mer est une discipline ardue qui nécessite un long apprentissage pratique et de bonnes bases théoriques. Parmi les différentes facettes de la cétologie, l’étude comportementale est celle qui requiert le plus d’expertise et donne des résultats souvent incertains. Bien que le Groupe de Recherche sur les Cétacés utilise depuis 25 ans une fiche d’observation détaillée permettant de noter une vingtaine de comportements, il n’est pas exceptionnel que nous terminions une observation en indiquant « activité indéterminée », car l’ensemble des comportements observés demeure équivoque.

Des Grands dauphins à l’Est de Porquerolles, dimanche 05 juin au matin

Il est important de consigner les comportements, car au final leur observation fine permet de catégoriser l’activité des cétacés, qui est primordiale pour décrire leur écologie : sont-ils en train de manger, socialiser, se reposer, ou voyager ? S’agit-il d’une activité mixte au sein du groupe, comme repos ET socialisation ?

De plus, seule une connaissance juste du comportement des cétacés « au naturel » permet de détecter quand les cétacés sont dérangés par une présence ou une activité humaine. Prenons l’exemple d’une observation de Grands dauphins effectuée dimanche 05 juin 2022 au cours d’une prospection-école.

En conformité avec l’éthique scientifique naturaliste, c’est après une phase d’observation lointaine qu’un groupe est approché doucement pour déterminer sa composition et éventuellement pratiquer la photo-identification… jumelles et téléobjectif nécessaires afin de ne pas risquer de les perturber !

Après une observation attentive d’une vingtaine de minutes, l’ensemble des comportements observés n’a pas permis de synthétiser l’activité en une catégorie simple : d’abord catégorisée en voyage, l’activité a ensuite compris des phases de socialisation dans deux des trois sous-groupes qui composaient le groupe d’environ 12 individus. Donc, le groupe de dauphins ne montrait pas une activité unique dans le temps, et selon ses différentes composantes.

Un individu turbulent vient faire une reconnaissance au voilier… mais est-ce « il » ou « elle » ?… Autre difficulté persistante de l’étude en mer !

C’est pour cette raison que le Groupe de Recherche sur les Cétacés a inventé PADOC, une application gratuite conçue par des experts et développée par un informaticien de haut niveau.
La collecte de multiples comportements observés au cours d’une observation scientifique est possible, et des « patrons » peuvent ainsi progressivement être établis pour chaque espèce afin de qualifier les comportements usuels naturels, ce qui permettra ensuite aux cétologues d’objectiver si un groupe de cétacés a été perturbé par un facteur externe, ou pas.
Pour les plus curieux, notez que l’application a tout récemment connu une évolution majeure, que nous vous détaillerons très bientôt et qui la transforme en outil complet de suivi de prospection et d’observation, afin de pouvoir garder facilement trace de sa navigation même entre deux observations.

Avec PADOC, même les phases très dynamiques d’un comportement, éventuellement en lien avec le bateau observateur, peuvent être consignées… parfois un vrai défi lorsque douze animaux se mettent à s’agiter !

Concernant nos Tursiops, bonne nouvelle, l’ambiance était calme en début de matinée, et une ou deux sondes discrètes au passage de vedettes de plongée ont suffi pour assurer leur tranquillité dans la Grande Passe séparant Porquerolles de Port-Cros. Nous les avons ensuite quittés alors qu’ils approchaient du cap des Mèdes et de la face nord de l’île, souvent assez fréquentée par les plaisanciers lors de belle météo ; nous espérons que la suite de leur journée aura été paisible !

Alexandre et cetaces.org