Un mystère enfin élucidé ?

Les échouages de mammifères marins sont des événements courants et sont observés sur toutes les côtes du monde. Rien de bien étonnant de croiser sur une plage ou parmi les rochers un dauphin échoué. En France d’ailleurs, de nombreux échouages sont répertoriés chaque année par le Réseau National Echouage. Cela peut tout de même devenir un événement marquant lorsqu’il s’agit d’un échouage de baleine, à cause de la taille impressionnante de l’animal, ou lors d’échouages d’individus en masse sur une même plage.

Alors pourquoi est-ce que les échouages observés au Pérou au début d’année 2012 nous interpellent ? Tout simplement parce que le surnombre d’animaux échoués sur les 200 km de côtes péruviennes en 2 mois sort aussi de l’ordinaire… Pas moins de 877 dauphins, en majorité des Delphinus capensis (97 % des échouages) ont été observés échoués de la péninsule d’Illescas (Piura) à Cherrepe (La Libertad) (IMARPE, 2012). Face à cet événement inhabituel, l’Institut de la Mer du Pérou a entamé des recherches pour tenter de connaître les causes de ces échouages.

Echouages au Pérou
Zone d’échouages. Le cercle rouge indique la zone d’échouage globale. Le cercle bleu indique la zone de concentration d’échouages (Sources : ORCA).

De nombreuses causes sont possibles pour expliquer un échouage en général: mort naturelle, maladies, contaminations du milieu (déchets, pollution de produits toxiques, pollution sonore), interactions humaines (captures accidentelles, collisions avec des embarcations), phénomènes climatiques, problèmes de désorientation, etc… Des informations, telles que l’état de décomposition des individus, ont donc été répertoriées, et de nombreux prélèvements, ainsi que des autopsies de certains cadavres ont été effectués (Fig.2).

Jeune individu (dauphin commun ?) échoué sur les côtes péruviennes (Sources : ORCA).

Certaines causes possibles ont été écartées. C’est le cas par exemple d’une mortalité liée aux activités humaines, comme la pollution de l’environnement par les pesticides ou les métaux lourds, les interactions avec la pêche ou les explorations sismiques. De nombreuses causes naturelles ont également été écartées comme le manque de nourriture, les infections bactériennes, les virus ou encore les intoxications par des biotoxines. Cette étude n’a donc pas permis de mettre en évidence la ou les causes exactes des ces échouages massifs sur la côte nord du Pérou.

A contrario, un rapport de l’association ORCA (Organisation Scientifique pour la Conservation des Animaux Aquatiques) rend un tout autre rapport…  L’association a mené sa propre expertise sur 747 des individus échoués dont 680 dauphins communs. Le reste des individus échoués seraient de Marsouins Phocoena spinipinnis. Des analyses similaires à celle de l’étude de l’Institut IMARPE ont été réalisées. Le rapport révèle, que cet échouage massif serait dû à des accidents de décompression. En effet, l’étude montre de sévères traumatismes de l’oreille interne et des embolies gazeuses, après des examens histopatologiques et des recherches de lésions internes réalisées sur de nombreux cadavres. ORCA indique d’ailleurs dans son rapport les sources potentielles induisant des traumatismes de ce type chez les cétacés : l’utilisation de sonars de recherche géologique ou de prospections pétrolières ou de gaz, ou des sonars militaires de détections de mines et de sous-marins.

Le mystère n’est donc pas élucidé, puisque les deux rapports d’étude n’aboutissent pas aux mêmes conclusions…

Bibliographie

Instituto del Mar del Peru, 2012. Mortandad de Delfines en el litoral de la Costa Norte, febrero a abril del 2012. Informe final. 81pp.

Yaipen-Llanos C., 2012. Diagnostico médico veterinario sobre el evento de mortalidad masiva de delfines Comunes de Pico Largo (Delphinus capensis) y Marsopas Espinosas (Phocoena spinipinnis) en la costa norte del Peru. Febrero-Abril del 2012. Informe – #06-190512-C. Organizacion Cientifica para Conservacion de Animales Acuaticos. 35pp.

Copyright: Sandra Fuchs et cetaces.org, tous droits réservés.